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DER SKANDAL

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Volkswagen, chronique d’une crise qui va durer (épisode 1)
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L’annonce sur la « tricherie » de Volkswagen concernant ses moteurs diesel a déclenché un tsunami en plein salon de Francfort dédié à l’automobile. On peut d’ailleurs saluer le commentaire sur l’affaire d’un observateur sur Twitter souhaitant « bon courage aux équipes de Volkswagen sur leur stand à Francfort »… Au-delà de l’actuelle agitation médiatique, cette crise va avoir des conséquences durables pour l’image de Volkswagen, et aussi et surtout pour celle de son industrie.

Crise : tout commence par un « SKANDAL »…

Les autorités américaines ont révélé, vendredi 18 septembre, que Volkswagen avait installé un dispositif pour dissimuler en partie les émissions de gaz polluant de certains modèles des années 2009-2015. Ce ne sont pas moins de 482.000 voitures diesel du constructeur allemand qui seraient concernées par cette supercherie, selon l’agence environnementale américaine (Environmental Protection Agency – EPA). En fait, les véhicules incriminés dépassaient de 10 à 40 fois les normes applicables aux Etats-Unis. La nouvelle d’une «Tricherie sur les émissions de diesel» comme le titre le New-York Times (1), s’est répandue comme une trainée de poudre.

 

…ou comment une ONG et une université font vaciller un constructeur automobile mondial ? 

Article Le Figaro

L’affaire à présent dévoilée sur la planète, trouve en fait ses origines en 2013. Année au cours de laquelle une ONG opérant dans les transports écologiques, l’International Council on Clean Transportation, aurait demandé à l’Université de Virginie-Occidentale d’effectuer des tests pour mesurer les polluants émis par les moteurs de trois véhicules dont deux sont produits par Volkswagen.

Quelques mois plus tard, face aux résultats étourdissants des tests opérés par ladite université, l’Environmental Protection Agency (EPA) décide d’ouvrir une enquête sur le constructeur allemand. La suite sera l’annonce de la supercherie par les autorités américaines le vendredi 18 septembre 2015.

La crise d’image que connaît actuellement le premier constructeur automobile mondial sera donc née, à la demande d’une ONG, dans la ville de Morgantown située dans l’état de Virginie-Occidentale. En fait ce qu’il faut surtout retenir, c’est que cette crise trouve son origine dans l’action de parties prenantes du constructeur allemand qui ne se contentent plus de normes ou tests sur lesquels l’industrie automobile a encore un fort pouvoir, étant ainsi juge et partie.

De multiples acteurs écologiques et associations de consommateurs dénonçaient déjà le fait que ces tests et leurs résultats sur les véhicules des constructeurs, ne correspondent absolument pas à une conduite réelle de ces derniers. On peut penser que la crise vécue par Volkswagen va apporter de l’eau à leur moulin…même si le sujet est de nature différente face à une tromperie avérée. En tout état de cause, l’industrie automobile pourrait subir plus rapidement que prévu une (ré)évaluation réellement transparente des performances énergétiques et environnementales de ses produits.

 

Une crise qui nécessite une réponse : « Warum* » ?

*Pourquoi ?

TDI Clean Diesel

Le lundi 21 septembre au matin, le constructeur indiquait qu’il cessait jusqu’à nouvel ordre de commercialiser ses modèles diesel (quatre cylindres) de ses marques Volkswagen et Audi aux Etats-Unis. Un moindre mal même si ses vrais enjeux en termes de marché pour ces modèles sont en fait en Europe…

La veille, le PDG de Volkswagen, Martin Winterkorn, déclarait :« Je regrette personnellement, et profondément, que nous ayons déçu la confiance de nos clients et du public ». Il promet par ailleurs de coopérer avec les autorités américaines « pour établir les faits rapidement et de façon transparente ».

Difficile au regard de cette crise d’avoir une autre posture pour Volkswagen même si ici, l’adage « faute avouée… » trouve ses limites. Depuis, la communication de crise de l’entreprise s’est réduite à son silence si ce n’est une « légère » correction de données. Anticipant les enquêtes annoncées dans plusieurs pays, Volkswagen indique le mardi 22 septembre qu’en fait, le nombre de véhicules incriminés est passé de 480 000, annoncés trois jours avant donc, à 11 millions sur la planète… Les équipes de Volkswagen ont probablement pris l’initiative de cette révélation. Ce chiffre serait a priori sorti tôt ou tard via des sources plus ou moins bien intentionnées. Selon un schéma classique, la crise s’amplifie avec la révélation de nouveaux faits et confirme la dimension mondiale de l’affaire. Comment rajouter de la crise à de la crise.

L’opinion et les autorités publiques demandent déjà des explications qu’il va bien falloir donner. Donc gageons que Volkswagen ne pourra pas se murer dans le silence trop longtemps. Gageons aussi que nous allons voir des mesures disciplinaires emblématiques chez le constructeur…l’éviction de son actuel PDG étant déjà évoquée à cette heure par la presse.

Il est encore plus probable que la réponse à cette crise sera collective c’est à dire formulée par l’ensemble de la filière automobile européenne car elle ne va pas s’arrêter au seul cas de Volkswagen.

 

Une crise d’image au superlatif

Sans titre

Bien sûr, s’agissant de Volkswagen, les chiffres donnent le tournis… et sont repris par l’ensemble des médias : un titre qui dévisse de plus de 17% à la Bourse de Francfort le lundi 21 septembre, puis de 20% le lendemain ; l’arrêt de la commercialisation des modèles de voitures incriminés aux Etats-Unis et le probable rappel technique des véhicules concernés. Une amende potentielle aux Etats-Unis de 18 milliards de dollars qui peut « piquer » un peu, même pour un groupe rentable comme Volkswagen. A quoi, on peut rajouter des actions collectives en justice de consommateurs américains avec à la clé un préjudice à indemniser. Au pays des « class action », un cabinet d’avocats avait déposé dès le vendredi 18 septembre, jour de l’annonce de l’affaire, une plainte collective contre le constructeur.

Mais la vraie gravité de cette crise pour le constructeur allemand a trait à son image plus qu’écornée. La presse allemande qualifie très durement l’affaire. Le SPIEGEL (2) note à juste titre que ce ne sont pas les milliards d’euros de pénalités qui sont le problème mais bien « l’atteinte à l’image » de Volkswagen.

Pour résumer, un acteur industriel de premier plan aurait sciemment menti, et en bafouant des valeurs environnementales dont il se revendique et qui s’avèrent « sacro-saintes » aux yeux de l’opinion publique. Autant dire que la confiance existant entre la marque Volkswagen et ses consommateurs, sera (très) longue à retisser.

Et cette crise ne va pas, ne peut pas se limiter au constructeur allemand comme nous le voyons déjà.

 

Une crise qui « vient d’Amérique »…

Politiques

Penser que la crise d’image de Volkswagen va se limiter à ce seul constructeur sur le territoire américain, est illusoire.

Dès le lundi 21 septembre, les gouvernements allemands et français notamment, ont demandé à ce que la lumière soit faite en Europe sur les pratiques de Volkswagen. «Nous attendons des constructeurs automobiles des informations fiables pour que l’autorité de contrôle puisse évaluer s’il y a eu des manipulations en Europe ou en Allemagne », a déclaré lundi un porte-parole du ministère allemand de l’environnement.

On peut aussi compter sur le dynamisme de nos ministres en France pour « faire toute la lumière » sur cette affaire ; trois d’entre eux, Michel Sapin, Ségolène Royal et Emmanuel Macron ayant déjà promis une enquête ! Nos élus peuvent comme toujours avoir du zèle quand ils rejoignent les préoccupations de l’électeur, pardon « de l’opinion ». Signalons une déclaration toute en nuance de François-Michel Lambert, député écologique : « Volkswagen a travaillé contre le peuple, Volkswagen doit disparaître comme marque » (sic).

En résumé, la propagation d’une crise d’image d’un industriel mondial est…logiquement mondiale. A titre d’exemple, le même lundi 21 septembre, les autorités de la Corée du Sud ont convoqué le constructeur.

 

Une crise contagieuse pour l’ensemble de la filière automobile et le lobby du diesel…

Diesel

La défiance de l’opinion ne peut légitimement se limiter à un constructeur automobile. Il faut rajouter que le constructeur allemand représente déjà à lui seul 12 marques automobiles. On peut sans doute envisager que si Volkswagen a usé de « tricheries » ; certains de ses homologues peuvent aussi le faire.

A titre d’illustration sur cette « contagion », Renault et PSA voyaient dès le lundi 21 septembre leurs cours en bourse baisser. Plus grave, les équipementiers automobiles sont aussi affectés. Mardi 22 septembre, Plastic Omnium était ainsi sanctionné par les places boursières ; situation obligeant l’équipementier automobile à formuler un communiqué de presse pour signaler qu’il ne fournissait pas Volkswagen pour ses modèles mis en cause…

Au delà de la falsification de données sur des véhicules par un ou plusieurs constructeurs, une autre crise va naître ; celle du moteur diesel. Dès le lundi 21 septembre, un analyste interrogé par Reuters notait que « Cette affaire devrait avoir des conséquences négatives sur ses ventes de voiture diesel et ses ventes en général. La réputation de la marque est entachée aux Etats-Unis et il faudra beaucoup, mais beaucoup de temps pour inverser la tendance. On observe ce matin des dommages collatéraux pour d’autres marques du secteur et notamment pour les marques allemandes ».

Une crise du moteur diesel aux Etats-Unis est une chose ; en Europe elle en est une autre. Le diesel ne représente que 3% du parc de véhicules de tourisme américain, mais sa part atteint 53% en Europe. On comprend l’empressement de Berlin à réclamer des constructeurs des éléments de réponse afin de « regagner la confiance perdue ». La question se posera de la même manière en France où notre fiscalité favorise depuis des dizaines d’années la technologie du moteur diesel alors que ses effets sont plus nocifs que l’essence pour notre santé…sous la pression d’une industrie automobile européenne qui a pris le parti depuis les années 70 de développer cette technologie.

Le lobby industriel du diesel va être bousculé par la crise qui naît, et une remise en cause du « tout diesel » pourrait s’avérer douloureuse en Europe.

 

Nous ne connaissons donc que le début de cette crise aux implications et conséquences « KOLOSSAL ».

Quelle sera la posture de Volkswagen dans les jours et semaines qui viennent ? La contagion de cette crise à l’ensemble de l’industrie du moteur diesel se confirmera-t-elle ? Les autorités publiques européennes soutiendront-elles comme depuis toujours cette industrie, ou à l’inverse céderont-elles à la pression de l’opinion publique animée par une forte défiance qui peut s’entendre en l’occurrence ? La suite au prochain épisode, ils devraient être nombreux !